mardi 10 juin 2008

Tadeusz Rozewicz

Tadeusz Rozewicz né en Pologne en 1921. Poète de la responsabilité morale, Rózewicz crée un style laconique, dépouillé, à la recherche d’une simplicité.

Poésie :

Rozewicz écrit de la poésie vraie. Avec des mots simples, il bâtit peu à peu une œuvre accessible, simple et profonde.

* Anthologie personnelle
traduit du polonais par Georges Lisowski, Allan Kosko, Actes Sud, 1990. – 176 pages, Broché 22,87 EUR

* Inquiétude, poèmes choisis et trad. par Grazyna Erhard préface de Jacques Burko. -Buchet Chastel, 2005.- 142 pages, Poche 7,50 EUR

* Regio : et autres poèmes, traduit du polonais par et présenté par Claude-Henry du Bord et Christophe Jezewski, Arfuyen, 2008.- 208 pages. Broché 18,50 EUR

Recueil de poèmes de T. Rozewicz, marqué par la Deuxième Guerre mondiale et par l'assassinat de son frère par la Gestapo. L'auteur souligne la cruauté du monde contemporain et présente la vie comme un combat contre le néant. Les poèmes les plus récents montrent, eux, une fascination croissante pour la personne du Christ.

Théâtre :

Le théatre de Rozewicz est le reflet d'une génération marquée par le traumatisme des deux guerres ravagé l'Europe et le monde au début du 20e siècle. Il y exprime dans un style réaliste et poétique, son vécu (entre occupation allemande et stalinisme ultérieur), sa conscience et l'inspiration venue d'auteurs comme Kafka, Witkiewicz, Gombrowicz...

* Le Piège, conversation interrompue
traduit du polonais par Alain van Crugten, Ed. théâtrales, 1993. – 94 pages, Broché 13,72 EUR

Résumé : Dans un mélange de naturalisme et d'irréalisme, voici quelques moments imaginés de la vie privée de Kafka. Son enfance entre les femmes et la brutalité carnassière du père. Puis la jeunesse et l'âge mûr. Max Brod, le confident. La faiblesse de Franz et son égoïsme. Enfin la vision de l'holocauste qui est la clé de toute la pièce.

* Théâtre

Volume 1, Comprend : Le fichier, Témoignage ou Notre petit confort, l'Age d'homme, 2005. – 134 pages, Poche 9,00 EUR

* Volume 2, traduit du polonais par Jacques Donguy et Michel Maslowski, Comprend : La vieille femme qui couve, Un drôle de petit vieux, La sortie de l'artiste de la faim, , l'Age d'homme, 2008. – 200 pages, Poche 9,00 EUR

samedi 22 mars 2008

Révolution




Dans ma chambre le lit se trouvait ici, l’armoire là et entre les deux il y avait la table.

Jusqu’au jour où j’en eus assez.

Je déplaçai le lit là, et l’armoire ici.

Pendant un certain temps je sentis couleur en moi un courant novateur vivifiant. Mais au bout de quelques jours…l’ennui revint.

J’en tirai la conclusion que la source de mon ennui était la table, ou plutôt sa position immuablement centrale.

Je poussai donc la table là, et le lit au milieu. De façon anticonformiste.

Cette seconde nouveauté me redonna de la vitalité, en tant qu’elle dura, j’acceptait la gêne anticonformiste qu’elle occasionnait. En effet je pouvais plus dormir maintenant le visage tourné vers le mur, ce qui avait toujours constitué ma position préférée.

Au bout d’un certain temps, néanmoins, la nouveauté cessa d’être nouvelle, et seule subsista la gêne.

Dans ce conditions, je poussai le lit ici et l’armoire au milieu.

Cette fois, le changement fut radical.

En effet, l’armoire au milieu de la chambre, c’était plus que de l’anticonformisme.

C’était de l’avant-garde.

Au bout d’un certain temps, néanmoins…

Ah, ce maudit « certain temps » !

Bref, même l’armoire au milieu de la chambre cessa de ma paraître quelque choses de nouveau et d’inhabituel.

Il convenait d’opérer une cassure, de prendre une décision fondamentale.

Si, dans le cadre si-dessus définit, aucun véritable changement n’était possible, il importait de sortir complètement de ce cadre.

J’ai pris la décision de dormir dans l’armoire.

Tous ceux qui ont essayé de dormir debout dans une armoire savent qu’avec une telle absence de confort on est absolument assuré de n’est pas trouver le sommeil, sans parler de l’exténuation qui s’empare des jambes, et des douleurs dans la colonne vertébrale.

OUI, ce fut une bonne décision.

Succès, victoire complète.

Car, cette fois-ci, même le « certain temps » n’eut aucun prise. Au bout d’un certain temps, non seulement je ne m’habitait pas à mon changement, c’est à –dire que le changement demeura changement, mais au contraire, je ressentis ce changement avec de plus en plus d’acuité, car la douleur allait en croissant à mesure que le temps passait.

Tout aurait donc été pour le mieux, n’eût été ma résistance physique, qui s’avéra limitée. Une certaine nuit, je n’y tins plus. Je sortis de l’armoire et m’allongeai sur le lit.

J’ai dormis trois jours et trois nuits.

Après quoi je poussai l’armoire contre le mur, et la table au milieu, car l’armoire au milieu me gênait.

Maintenant le lit se trouve ici, comme avant, l’armoire là, et entre deux il y a la table.

Quand l’ennui me guette, je me remémore l’époque où j’étais révolutionnaire.

« La vie est difficile » Slawomir Mrozek






lundi 17 mars 2008

la consolation du savoir




Monsieur Cogito cherche un conseil

Tant de livres de dictionnaires

d'encyclopédies obèses

mais personne auprès de qui prendre conseil

on a étudié le soleil

la lune les étoiles




on m'a perdu

mon âme

refuse la consolation

du savoir





Zbigniew Herbert

mercredi 12 mars 2008

mercredi 16 janvier 2008

encore Tadeusz Rozewicz



la vie
quel beau cercle
parfait
parfaitement rond


faibles malheureux
les jeunes gens
essaient de s’y dérober
d’y échapper


ils tentent
de briser
de casser
de changer le cercle
en un carré noir


ne t’enfièvre pas
ne te presse pas
ne désespère pas


il ne faut pas !


attends patiemment
n’accélère pas
ne porte pas la mains sur toi


la seule
la vraie
sortie
de ce cercle
c’est la mort


attends !
ça viendra tout seul
sans démarches sans larmes
sans gestes inutiles
sans lettres d’adieu


par la naissance
ensanglanté aveugle
criant
tu es tombé
dans le cercle enchanté


ton cercle de craie
plein d’ombres et de lumières
idéal parfaitement clos
c’est le dernier Dieu
à être vivant


par la mort
tu en sortiras


donne-moi la main





dimanche 13 janvier 2008






Au milieu de la vie

après la fin du monde
après la mort
je me suis retrouvé au milieu de la vie
je me recréais
je reconstruisais ma vie
les hommes les animaux les paysages

c’est une table disais –je
c’est une table
sur la table il y a du pain un couteau
le couteau sert à couper le pain
de pain se nourrissent les hommes

il faut aimer les hommes
j’apprenais le jour et la nuit
que faut-il aimer
je répondais les hommes

c’est une fenêtre disais-je
c’est une fenêtre
derrière la fenêtre il y a un verger
dans le verger je vois un pommier
ce pommier fleurit

ses fleurs se fanent
les fruits se forment
mûrissent


mon père cueille la pomme
cet homme qui cueille la pomme
est mon père

j’étais assis sur le seuil
cette petite vieille qui
tire une chèvre au bout de sa corde
est plus utile
et plus précieuse
que les sept merveilles du monde
celui qui pense et éprouve
qu’elle est inutile
commet un homicide

ceci est un homme
ceci est un arbre ceci du pain

les hommes mangent pour vivre
me répétais-je
la vie humaine est importante
la vie humaine pèse lourd
la valeur de la vie
dépasse la valeur de tous les objets
que l’homme a crée
l’homme est un très grand trésor
répétais-je obstiné

ceci est de l’eau disais-je
ma main caressait les vagues
je parlais à la rivière
eau disais-je
bonne eau
c’est moi
l’homme parlait à l’eau
parlait à la lune
aux fleurs de la pluie
l’homme parlait à la terre
aux oiseaux
au ciel

le ciel restait muet
le terre restait muette
s’il entendait une voix
qui voguait
de la terre, de l’eau et du ciel
c’était la voix d’un autre homme